Athur Young* ne décolère pas contre les Français qui privilégient la culture du seigle : "La surabondance de seigle dans toutes les parties de la France, même dans les plus riches, est probablement l'une des plus grossières absurdités de l'agriculture européenne... Cependant, il n'est pas un sol, dans tout le royaume, qui soit assez mauvais pour exiger du seigle. Tout, dans l'ensemble, est assez bon pour le blé. * Arthur Young, Voyages en France. Passionné d'agronomie, il découvre la France, dont notre région, au cours de trois voyages qu'il fait dans les années 1780. |
C'est donc une nourriture fondamentale, presque quotidienne. Laboulinière, Secrétaire Général de la Préfecture des Hautes-Pyrénées, écrit dès 1825 que les diverses préparations du maïs - voir pour les recettes de pastet en particulier : La nourriture de tous les jours et Un repas Gascon de Joseph de Pesquidoux, la recette du milhas - , sont aussi économiques que nourrissantes. : galettes de milhas, pastet et pain appelé mestura. Cette notion était encore répandue il n'y a pas si longtemps : Madame Soulès de Bonrepos me l'a confirmé, tandis que son fils Claude ajoutait qu'il en était un peu saturé. Puis le maïs fut utilisé pour l'alimentation des animaux, volailles et porcs. L'été, une tradition encore vivante récemment voulait que, pour renforcer la plante, la fleur soit coupée et donnée à manger aux vaches. Mais le maïs n'a pas que des applications alimentaires. Ses sépales servent à remplir les paillasses, ses épis une fois dépouillés du grain ravivent le feu, et dans la mode féminine, on l'utilise pour fabriquer des bonnets "pour les jours de dimanche et fêtes" réputés élégants et imperméables.
Les incidences du maïs sur la vie paysanne furent donc considérables, on a donc parlé de révolution :
- l'ère des famines sévères disparaît et le quotidien alimentaire est amélioré,
- la plante étant exigeante en amendements, les façons culturales doivent s'adapter : la jachère improductive se trouve réduite, l'assolement qui était biennal, jachère une année sur deux, devient peu à peu triennal, jachère une année sur trois. L'intérêt suscité par la culture du maïs est tel qu'elle entraîne des défrichements importants souvent au détriment des forêts. Enfin les vaches y trouvent, avec les "jambes" de maïs, un supplément de nourriture non négligeable en automne quand l'herbe se raréfie.
Il faut noter que c'est le Sud-Ouest de la France qui bénéficia surtout du miracle, car il y règne un climat de prédilection pour le maïs. "Elle [la plante] a besoin de longs soleils et de pluie. Elle frémit à l'air flamboyant, elle ruisselle avec délices sous les orages d'été. À ce régime, dans les terrains d'alluvions, elle s'élève jusqu'à trois mètres " *.Il fallut attendre bien des décennies avant que le maïs, à l'aide d'hybrides convenables, parvienne à envahir l'Artois et le Douaisis.
...On la cultive partout, parce qu'on en a connu tout le prix dans les années où le blé manquait aux besoins de la France... Cet aliment que rejetait le pauvre, est aujourd'hui admis sur la table du riche et on le regarde, avec raison, comme le plus puissant auxiliaire du froment. Comme aliment, la pomme de terre n'exige presque aucune préparation, et néanmoins elle se prête à tous les goûts, et supporte tous les apprêts, sans perdre toutefois la qualité qui la caractérise. Comme nourriture des bestiaux, la pomme de terre est encore une des meilleures et des plus économiques qu'on puisse leur donner pendant l'hiver. Sous tous rapports, la pomme de terre est une des conquêtes les plus précieuses qu'ai faites l'agriculture depuis bien des siècles... Petit détour linguistique. Le mot "pomme de terre" a, en patois bigourdan, des traductions diverses selon les villages : mandorras à Tournay et Galan, trufés à Barèges, toumatas à Arrens. C'est la caractéristique du patois, il faut donc plutôt parler des patois : certains mots sont propres à un village. Problème évoqué au début du chapitre "Morceaux choisis". |
Les conséquences inattendues de ces progrès :
Curieusement, si ces nouvelles ressources alimentaires que sont le maïs et la pomme de terre permettent d'éviter la disette, ce qui est un progrès certain, la situation n'est pourtant pas aisée en matière d'alimentation. En effet, un phénomène nouveau apparaît, c'est le surpeuplement qui engendre, d'une part une augmentation du prix des terrains arables et un défrichement excessifs de terres quelquefois médiocres, et d'autre part une tendance des jeunes à émigrer. La mécanisation, qui pourtant tarde à s'imposer, engendre des effets inattendus : les familles nombreuses à l'époque étaient quelquefois trop nombreuses pour l'importance de la propriété et la main d'uvre excédentaire soit se louer comme elle peut, ambitionne soit d'aller à la ville pour y trouver quelque emploi - de fonctionnaire de préférence -, soit de s'expatrier au Mexique, aux États-Unis surtout, ou en Amérique du sud, entre autres. Chaque famille ici peut en citer des exemples. Les Barbat très nombreux à Galan durant la 2ème moitié du XIXe siècle virent un enfant partir à 19 ans pour la Floride. Un de mes ancêtres, Ibos de Galez, alla travailler à la Nouvelle-Orléans où il se fit appeler "Ybos" et bien d'autres encore dont les descendants américains recherchent avec amour les traces par l'intermédiaire de Cercles Généalogiques.
Heureusement, cette relative prospérité a, techniquement, des effets bénéfiques : en effet, on va s'efforcer d'augmenter les rendements et de mécaniser les tâches. C'est la naissance de la génétique appliquée. On améliorera les races ovines et bovines par des croisements avec des étalons étrangers. Des blés et des seigles importés d'Allemagne, du Danemark, d'Écosse apparaissent sur le marché dès 1880 importés par la célèbre famille de Vilmorin dont le livre Les meilleurs blés fait alors autorité. Notre région s'y intéresse tardivement, au début du XXe siècle seulement.
Les légumes cultivés au "jardin" à la fin du XVIIIe siècle ou au début du XIXe siècle. |
– les façons culturales, | ||||
– la "bonté" (les qualités gustatives), | ||||
– la "diète" (la plante est un médicament). |
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Le Chou "Daubenton" |
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La Raiponce |
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Le raifort |
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La Patience |
QUIZ.
"Quel est nom actuel du légume appelé autrefois mélogène, ou mellogène?"Pour vérifier votre réponse, cliquez ICI. |