Joseph de Pesquidoux à table

Un savoureux et plantureux menu Gascon

[Le texte est extrait de "Chez nous en Gascogne " de Joseph de Pesquidoux. Ed. C. de Bartillat. Seuls ont été rajoutés les sous-titres, accessibles directement par le menu ci-après. Certains plats décrits ici comme les ortolans ne sont pas spécifiques de Galan; ils appartiennent - ou plutôt appartenaient, car la chasse en est prohibée - au terroir des Landes, précisément du Houga où se passe l'action. Mais ce récit gourmand est tellement succulent qu'il a bien sa place ici. Et puis, il ne faut pas être trop raciste !].

Alphonse Daudet
C'est à la carte, vous pouvez choisir votre plat :

Aperçu des réjouissances.
Le cadre.
On "approche" les plats.
Les ortolans. Leur vie, leur mort.
La recette du millas.
Les " glorias " : café, brûlots, armagnac.
La nuit silencieuse.
Final.


Quelles sont ces réjouissances ?


Le menu sommaire d'un souper traditionnel, "lous carnassiès", la folle-blanche, le jurançon, l'armagnac.

...Nous étions entre amis, entre hommes. Priés pour 7 heures et demie, nous arrivâmes tous à 8 heures passées. Ainsi le veut l'usage, et aussi le tracas de la fin du jour aux champs. C'est le moment où l'on donne un dernier coup d'œil aux gens et aux bêtes qui rentrent, 1'ombre faite, où l'on distribue les ordres pour le lendemain, où l'on règle pour soi-même la journée qui doit venir. Alors seulement on se sent libre, on laisse les soucis " par-derrière ", on les oublie. On se vêt pour le soir, et la nuit, qui, lorsque le froid gagne, semble appesantir le repos qu'elle apporte, la nuit profonde et pure détend l'esprit avec le corps. On me traita comme un " carnassier ". Nos paysans divisent les gros mangeurs en deux classes " ceux qui mangent de tout, selon la coutume, ceux qui ne consomment que de la viande, de toutes les viandes il va sans dire. Ils appellent ces derniers lous carnassiès. Ce fut donc un repas de loups, sauf qu'on ne le servit point saignant. Un souper traditionnel, à la mode de nos grands-pères quand ils se recevaient, qui comportait, après la soupe, un service de bouillis, un service d'entrées, un service de rôtis, et puis des pâtisseries ou " blancs-mangers ", enfin les " glorias ". Ni légumes ni dessert. Non, des mets compacts, de la chair blanche ou noire, dense et onctueuse ensemble, ferme assez pour laisser à la dent le plaisir de la trancher, tendre assez pour ne point interrompre la parole ou couper le rire. Je ne parle pas de certains morceaux délicieux et fondants, fournis par l'oiseau de passage. Pour la pâtisserie, elle se composa de gâteaux ou plutôt de pâtés aussi lourds à la main que la chair elle-même, où la fourchette se fichait comme un pieu. On arrosa le tout de folle-blanche, nommée ici piquepoult *, qui pétille à travers la fumée des reliefs, et de jurançon, dont le goût et l'arôme particuliers aiguisent la saveur des blancs-mangers. Ce jurançon est celui du Béarnais. On lui en frotta les lèvres quand il naquit, afin qu'il devînt gaillard à tous les jeux. Il croît sur de maigres coteaux, dans une terre sèche mêlée de cailloux ébréchés, pierres à fusil d'autrefois, pierres à briquet d'aujourd'hui, et là, trempant et baignant dans la flamme, celle qui couve aux veines du terroir, il prend on ne sait quel bouquet, on ne sait quelle senteur de chose incendiée, pareille à l'odeur même de l'étincelle qui jaillit du silex... Bien entendu, les glorias étaient tous faits avec de l'armagnac. Produit illustre " depuis l'eau-de-vie blanche, encore un tantinet cuivrée, que l'on mêle au café pour le parfumer. Depuis l'eau-de-vie jaunissant sous le verre, consommée en " brûlots ", jusqu'à l'incomparable liqueur centenaire, versée avec respect, longuement chauffée dans la main et respirée, humée, bue de la narine en silence, avant de l'élever jusqu'aux lèvres...

* Le piquepoult est évoqué à propos du Château du Tariquet.

Le cadre.

Nous nous mîmes à table dans une vaste salle dallée, 1ambrissée, aux caissons de bois. Les poutres énormes descendaient sur nos têtes. Une cheminée régnait au fond. De la largeur de la muraille presque, elle avançait de plusieurs pas dans la pièce, et son manteau reposait sur piliers comme un toit, et son foyer s'ouvrait comme une porte d'ombre. Il faisait trop doux encore pour l'allumer. Aux deux bouts de la table des candélabres étincelaient, buissons de bougies étagées. C'étaient deux bronzes à demi drapés, deux femmes debout sur leur socle, aux profils droits, et qui, de leurs bras levés, portaient tout cet embrasement. La lumière ruisselait des bougies comme une eau chatoyante, et les épaules rondes et les flancs évasés des porteuses paraissaient tressaillir sous ce toucher de feu. Et la table, large comme une aire, rayonnait doucement avec ses porcelaines, ses cristaux, et l'argent de ses couverts, ainsi que la terre au clair de lune...

On "approche" les plats.


Un vrai défilé ! La recette de la croustade.

Cependant, on " approchait " les plats. La soupe aux choux verts d'abord, mitonnée et gratinée, dans sa casserole de terre, sous une couche de chapelure et de fromage râpé, fumante de toutes parts ~ et puis les bouillis " une pièce de bœuf sombre, épaisse, persillée, une poule et un chapon face à face, poitrine contre poitrine, également rebondis, différents de volume seulement, à l'avantage du chapon dont l'ossature était restée d'un mâle; enfin, terminant le service, un important morceau de côte de porc. Ceci était quartier de choix. Venu du fond d'un pot où il s'était imprégné de graisse fine depuis l'hiver d'avant, passé par la marmite pour y nourrir la soupe, tout en abandonnant son excédent de gras, il ballottait à présent sous le couteau, et révélait une chair rose, lisse, d'un fumet subtil comme une émanation. Et la sauce passa. Une sauce héroïque, de vinaigre et de bouillon battus, chargée d'ail et d'oignon hachés " offerte " pour humecter le bœuf ou le porc, et " mouiller " la poule et le chapon farcis de mie de pain et d'oie confite. Le piquepoult circulait comme un flot. Et l'on apporta les canards en salmis et la croustade de viande " les deux entrées. La croustade eut les honneurs... composée d'une compote de volailles corsée et sans liaison; montée en pyramide dans une tourtière graissée, garnie d'une pâte constituant comme une seconde terrine, substance onctueuse, exactement dosée de farine, de blancs et de jaunes d'œufs, et battue, pétrie, roulée; recouverte d'une autre bande de pâte semblable, à la façon d'un toit circulaire; décorée de dentelures à la fourchette tout autour. Surmontée enfin d'un clocheton ouvragé de farine prise encore, elle rappelait ces petits temples indiens où sommeille, assis, quelque bouddha millénaire. Et certes, ni le soleil, ni les siècles, ni les mains et les fronts des suppliants, en s'y traînant, n'ont roussi ni patiné les murs saints plus que le feu vif de dessus et le feu amorti de dessous les parois et le dôme de la croustade dans le four de campagne... Les rôtis suivirent, des dindonneaux entre autres, poussés et gavés depuis plusieurs jours avec des boulettes de maïs concassé, que l'on présenta à deux bras tant ils pesaient, côte à côte sur le plat empli comme deux bœufs couchés.

Les ortolans. Leur vie, leur mort.


[Honnêtement, je reconnais que nous nous éloignons là du terroir Galanais; les puristes auront raison de me dire que l'ortolan n'a jamais été chassé à Galan. Mais ces ortolans sont si bien décrits par Joseph de Pesquidoux, si appétissants à la seule lecture que j'ai voulu vous les faire miroiter et déguster. Leur chasse étant maintenant interdite, vous avez ici sous la dent la seule dégustation autorisée, par la lecture, certes "virtuelle" mais bien stimulée par l'imagination, et combien savoureuse.]

La Fédération Départementales des Chasseurs des Hautes-Pyrénées affirme qu'on ne chasse actuellement plus aucun ortolan dans le département. C'est exact. Mais je détiens un témoignage d'un bigourdan pur et dur, Pierre Dabat, qui habite au sommet de la colline des Paloumières qui domine Bagnères d'où il a une si jolie vue sur le Pic du Midi et l'Arbizon. Il me dit : "Dans ce quartier, il y avait un petit propriétaire qui possédait un pré d'un hectare en bordure de la route des Paloumières et qui, seul dans la région, avait le droit de chasser l'ortolan. L'autorisation lui était donnée par le Sous-Préfet et le Maire, sans doute par respect d'une tradition, mais à une condition : le pré ne devait pas être visible depuis la route, ce qui imposait d'entretenir une haie dense de frênes et d'arbustes variés de plusieurs mètres de haut. Dans le pré, au moment des passages, on disposait sur des mottes de terre alignées de 80 cm de haut construites à cet effet des provisions d'orge, de seigle ou de blé qui, immanquablement, attiraient les oiseaux en nombre. Quand le pré était bien envahi, un système de filets s'abattait sur les ortolans qu'on n'avait plus qu'à cueillir. La chasse avait lieu du 15 septembre au 15 octobre et de toutes façons, dès que les feuilles commençaient à tomber, la haie s'éclaircissait, la chasse était terminée. Cela dura jusqu'en 1927. Les hôtels et les restaurants de Bagnères étaient pratiquement les seuls clients du butin. A la saison, on voit encore de nombreux ortolans voler au dessus des Paloumières".]

Comment on capture les ortolans, comment on les engraisse, comment on les déguste.

... Mais rien n'effaçait la haute croûte, quand, précédés d'un bruit de fricassée, achevant de rissoler dans le jus exsudé de la chair même, des ortolans apparurent dans leur caisse étroite de papier huilé. Six ortolans pour chacun, fondants comme un fruit, et nus, polis à l'œil comme l'ivoire, qui avaient pris sur les charbons des teintes de feuilles mortes. Ils venaient de loin... Ils arrivaient du Nord dont ils sont fils. C'est là qu'ils s'accouplent et nichent, au cours du printemps, au retour de la traversée qui les ramène d'Afrique où ils hivernent... Ils passent deux fois chez nous, du 15 août au 15 septembre en y allant, du 15 avril au 15 mai en en revenant. Premiers et derniers migrateurs que l'on voit, ils ouvrent et ferment la chasse aux oiseaux voyageurs. Ils passent si tôt et si tard parce que très délicats, extrêmement fragiles, ils fuient le gel qui les tue. Tout au reste leur est nuisible, et la grande chaleur autant que le froid presque, car ils naissent dodus et arrivent vite à l'embonpoint excessif. Pourtant, ils cherchent le soleil.
Ortolans.
Le mâle et la femelle.
Et dire que certains osent les manger !
Mais un soleil apaisé, comme uni, celui qui couvre le sable sans l'altérer, au désert, l'hiver, celui qui baigne sans les brûler les feuillages opulents des pays septentrionaux, l'été. Ils paraissent n'aller et ne venir que par souci de leur santé, pour s'assurer un climat propice. Non point comme les bécasses qui veulent aimer dans les solitudes, parmi " les empires vides " de l'Ancien Monde, comme les palombes qui cinglent vers les terres profondes peuplées d'oasis pour y abriter et y fortifier leurs petits... Les ortolans arrivent en vols d'oiseaux gris tachés de roux, et se posent à des heures fixes " le matin en été, à midi au printemps. Ils voyagent ainsi avec la fraîcheur de la nuit à l'aller, de la matinée au retour. Ils ne changent d'heures que sollicités par un temps particulièrement favorable ou pressés par le danger. A l'ordinaire, au premier passage, ils montent dans les feux du soir, s'orientent, prennent le vent, la brise du nord-est qui naît ici quand meurent les rayons, et partent dans le courant aérien. Ils s'embarquent, au second, par vent de sud-ouest, avec le jour, et se hâtent dans le soleil éclos. Ils aiment les souffles qui règnent haut, soit qu'ils les trouvent plus libres, soit qu'ils les sentent plus égaux loin des obstacles de la terre. Ils s'élèvent avec eux sans hésiter, comme dans un élément naturel. Quand ils descendent, ils atterrissent en s'éparpillant. Ils hantent les couverts pour s'y reposer et dormir, taillis, vergers, haies surtout où ils se coulent, et les points d'eau pour se rafraîchir. Ils boivent plus qu'ils ne mangent. Ils sont uniquement granivores. Ils picorent dans le millet ou les avoines, ou ramassent les menues graines tombées des hautes herbes. Chacun d'ailleurs vit pour soi. Cette indifférence vient sans doute de ce qu'ils voyagent séparément. Les mâles passent d'abord, les femelles ensuite. Jamais dans un vol de femelles, toutes grises, on ne capture d'individus portant jabot jaune, signe du sexe chez le mâle. Le contraire est vrai de même. De plus, on ne voit point de petits. On ignore les raisons de cet ordre de marche comme de cette absence de jeunes oiseaux. A moins de penser que la nature, consciente de leur fragilité, ne pousse au voyage que des oiseaux faits, et n'ébranle les mâles les premiers que parce qu'ils sont plus forts. On les chasse avec des " matoles ", pièges rectangulaires, en bois, bombés et treillissés, en tout semblables à des dessus de cages. On les arme d'un côté d'un fil de fer demi-circulaire fixé au bas des montants, de l'autre d'un bâtonnet au bout d'une ficelle... l'appareil, pris dans sa longueur. On choisit une aire unie, dans un champ ou un verger, et l'on y distribue les "  matoles " toujours sur le chemin aérien habituel aux migrateurs. On les place par rangs, le côté du fil de fer touchant terre, l'autre soulevé, et reposant sur le bâtonnet qui porte lui-même sur le fil en équilibre instable... Et l'on jette du millet dessous, et l'on dispose à l'entour des " appelants ". Ce sont des ortolans mâles capturés lors du dernier passage et mis en cage. Cela fait, on se dissimule. L'ortolan qui voyage chante ou plutôt pépie, sur une seule note aiguë, un cri bref et répété. Les appelants entendent et répondent. Le vol s'abaisse. Les appelants redoublent. Les autres descendent. Ce sont des oiseaux peu farouches. Ils entourent les cages, volent dessus, se réjouissent de la rencontre, causent de l'œil et du bec. Et puis, ils vont faire un tour sur l'aire. Ils aperçoivent le mil. Tellement fatigués, ils se félicitent de l'aubaine. Ils n'ont qu'à se baisser et à picorer. Ils se glissent sous les appareils. Ils mangent à petits coups, s'arrêtent, recommencent, et, comme l'heure est douce, ils secouent au soleil leurs plumes ébouriffées. Hélas ! Ils sautent sur le fil ou heurtent le bâtonnet " le piège tombe ! Ils ne poussent pas un cri, ne se défendent pas. Ils se livrent à leur destin... Ils sont mis " en gaIère ", petite boîte individuelle, carrée, percée d'un côté de deux trous. L'un s'ouvre sur un baquet d'eau, l'autre sur une auge de mil. Au-dedans, la nuit. Attirés par la lumière qui filtre, croyant fuir, les oiseaux passent leur tête dans les trous et boivent et mangent à l'excès. Ils engraissent prodigieusement. Quinze ou vingt jours après on les délivre. Courte joie. On leur plonge le bec dans un verre d'armagnac. Ils étouffent, ils avalent une gorgée en cherchant à respirer, ils expirent... Mais ils en restent parfumés... Voici comment on les mange. On les prend par une patte et on les croque d'une bouchée, tout entiers, avec les os, comme un bonbon. Les ortolans croqués, les voix s'émurent. Un rire d'aise courait la table.

La recette du millas.

Et l'on déboucha le jurançon, tandis que les blancs-mangers entraient. Au sens vrai du mot. il n'y en eut point. Ce fut un " pâté bouilli ", solide comme un pavé, et un " millas "... On raconte que la duchesse d'Angoulême, accompagnant son mari qui gagnait l'Espagne, fit halte à Mont-de-Marsan, où elle voulut goûter au pain de maïs du pays du millas. On le lui servit en gâteau... Délayez une demi-livre de farine de maïs dans un litre de lait chaud ; jetez-y trois quarts de livre de sucre, de la râpure de citron, et tournez jusqu'à ce que la bouillie épaississe; et puis mêlez un à un huit jaunes d'œufs frais; et puis battez leurs blancs en neige ferme; faites cuire enfin le tout dans une tourtière beurrée, au four de campagne, sur feu vif dessus et dessous " et vous aurez ce millas... La duchesse trouva le sien délicieux. Et elle remonta en berline. Le peuple l'acclama. Et lui, qui voit tout, s'aperçut qu'elle était sujette à un tic. qu'elle tournait fréquemment.et brusquement la tête sur son épaule, et jetait un regard derrière elle. Geste révélateur d'indicibles angoisses. Il lui venait des jours de la Terreur où elle était poursuivie de cris de mort, quand sa mère après son père mourait sur l'échafaud...

Les glorias : café, brûlots, armagnac.

Restaient les glorias. Ils débouchaient à la file, le café, les brûlots dans des légumiers hérissés de morceaux de sucre, et, portée sur un plateau bordé de petits verres, la dame-jeanne poussiéreuse, la double bouteille d'armagnac. À son aspect, on se leva. Elle datait de 1804 " du sacre de l'Homme. Et les allumettes craquèrent, et l'étincelle prit à la fois aux pipes et aux brûlots. Et ceux-ci, instantanément, se couvrirent de flammes jaunes, vertes. rouges, qui rampaient, s'élevaient, se couchaient encore. Tandis qu'un bruit continu de combustion sortait du liquide immobile. Et tous ces feux, au triple reflet, s'en allaient danser. s'en allaient rire sur les 1ambris, parmi la lueur bleue des bougies renouvelées. Le maître servit lui-même la dame-jeanne. La liqueur coula, pur filet d'or, d'or femelle, comme apaisé par le temps. Elle était fine, divinement, chaude encore, et moelleuse, sucrée, avec un soupçon de rancio venu du siècle traversé. Un puissant parfum de pruneau émanait d'elle, disait son excellence, d'elle, fille du raisin. Il est l'odeur intime de nos eaux-de-vie. Suave et pénétrant, il s'attache à tout ce qu'elles touchent, aux mains, au bois, au cristal. C'est une affinité mystérieuse entre produits du même sol, où peut-être un arôme particulier circule mêlé aux sèves, comme une âme végétale commune à ses fruits propres.

La nuit silencieuse.

Les heures avaient passé. Il fallut respirer. On ouvrit les fenêtres. La nuit roulait de l'est, fraîche, limpide, infinie. Tout reposait aux alentours, à l'horizon, au firmament. Et dans cette immobilité, bien que la lune fût couchée, on ne sait quelle clarté flottait autour des choses tant les étoiles palpitaient à longs rayons. Quelques souffles espacés de vent troublaient seuls l'atmosphère. Ils gagnaient d'arbre en arbre en secouant les feuilles. Et les feuilles se détachaient, tombant de plus en plus nombreuses, avec un bruit de chuchotement, emportées toutes d'un côté, le long des fossés, au bord des routes, comme roulées au même abîme. Puis tout se taisait de nouveau... Ce silence, cette ombre irradiée, ce frisson de chute intermittente touchaient l'âme de mélancolie. L'âme est ici facilement songeuse. Et chacun suivit un moment un rêve, l'œil perdu sur les côtes illuminées du ciel... Tout à coup, quelqu'un dit : " Quel temps, à l'aube, pour la chasse au lièvre ! "  On fit chorus. Le même reprit : " Allons chercher des chiens courants ". Les plus jeunes gagnèrent la porte. On les vit se hâter un instant dans la lueur projetée au-dehors par la pièce ardente, et disparaître vers le Lom, Pot-Ana ou Benquet. chenils connus.

Le mot de la fin.

Alors, notre hôte, grand buveur, grand mangeur, tueur de sangliers, me demanda :
" Êtes-vous satisfait ? " et il poursuivit " Certes, tout ceci est de pure tradition. Nos pères festoyaient ainsi, et partaient ensuite à la chasse au lièvre afin de s'aérer ". Il hocha la tête, et, tandis que je m'extasiais en moi-même devant l'amas de viandes et de pâtes consommées, il ajouta : " Nos pères mangeaient mieux; ce soir, ce fut un peu léger... "

Le gastronome affamé,
mais rien à voir avec Joseph de Pesquidoux !

Er' aygo que he ploura,
H bi que he cauta.
L'eau fait pleurer,
Le vin fait chanter.

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