Le Château du Tariquet

à 32800 Eauze
Tél.: 05 62 09 87 82   Fax : 05 62 09 89 49
Adresse du site Internet :http://www.tariquet.com


Il faut reconnaître qu'il n'est pas situé dans la proche banlieue de Galan. Il vous faudra ¾ d'heure environ pour y parvenir par le chemin suivant : plein nord direction Mirande, puis Vic-Fezensac, direction Eauze par la départementale 626. Au lieu-dit "La Prada" vous vous dirigez vers Courrensan et aussitôt vous verrez le chemin caillouteux qui se faufile entre les vignes jusqu'au château.

Vous ne regretterez pas le déplacement :Le Château du Tariquet vous êtes dans le Bas-Armagnac, la terre de prédilection pour produire ce que les pharmaciens du moyen-âge appelaient l'eau ardente qui se métamorphosa au XVIe siècle en un élixir, l'armagnac.

Un Château du XVIIe siècle de belle allure vous accueille, en fait, une bâtisse rectangulaire aux murs patinés, flanquée de deux tours d'angle; un ensemble à l'effet trapu, propre à défier les siècles. On vous racontera la vie du Château, ses heurs et ses malheurs : la crise due au phylloxéra en 1878, la modeste renommée de l'armagnac à une époque où certains producteurs ne se préoccupaient pas toujours des impératifs de l'œnologie - le mot ne date que de 1807 - et des exigences des clients. Et qu'un membre de la famille Grassa vous accompagne dans la découverte du domaine, vous en apprendrez encore bien plus et sur la famille, et sur le vin blanc, et sur l'armagnac. Vous serez frappé comme je l'ai été lors de ma première visite de la chaleur et de la gentillesse de cet accueil gascon.

Habilement, et c'est caractéristique de la maison, l'ancien et le moderne se côtoient. Les bâtiments techniques très modernes : alambics, laboratoire, cuves, embouteillage, stockage, sont tout proches mais ne sont pas visibles du château. La tradition est reine : pas d'innovation dans le choix des cépages, la conduite de la distillation, la nature du bois constituant les fûts.




"U cop dé Tariquet ! "
Le vin blanc Tariquet connaît un grand succès pour deux raisons.
Il ne ressemble à aucun autre car les cépages dont il est issu, le colombard puissant et fruité et l'ugni blanc fin et distingué sont originaux. Ils donnent des vins fruités légers un peu perlés dans lesquels les œnologues découvrent, je cite, des "senteurs exotiques de mangue, de citron vert, de pamplemousse, de litchi, d'épices, intimement mêlés aux parfums de pêche, d'abricot et de poire". D'emblée, le dégustateur est conquis et pas seulement par cette description dithyrambique, évocatrice d'évasion, de nature, de couleurs, de senteurs, de fragrances, d'arômes, de saveurs, de bouquets, etc. Plus prosaïquement il trouve ce vin fruité et délicieux.
La deuxième cause de ce succès est que le vin ne contient pas un atome de soufre, ce pernicieux conservateur que redoutent les estomacs fragiles. Tout le long de son élaboration, il est en permanence sous atmosphère d'azote. Le résultat est qu'il ne donne pas mal à la tête. Ces deux atouts lui valent d'être apprécié des palais - et des natures -  les plus délicats et quand il a fait souche quelque part on en redemande.
Le cas de ce grand village qu'est la rue Mouffetard à Paris est significatif : depuis qu'il s'y est implanté, un "p'tit blanc" est souvent synonyme de Tariquet.
Ce verre diaphane,
comme un rêve...

Il faut dire aussi que des esprits subversifs et frondeurs, citant les prétendus propos d'un prix Nobel fréquentant le quartier, ont fait courir la rumeur "le vin blanc fait maigrir ", adage évidemment incitatif pour beaucoup...

L'armagnac ne peut pas laisser indifférent. Même le trois étoiles est délicieux. Là encore la qualité des cépages, les mêmes que pour le vin blanc mais dans des proportions différentes, cultivés dans les parcelles au sol le plus favorable à chacun, le vieillissement dans des fûts minutieusement choisis et préparés, d'autres savoir-faire restés secrets comme l'assemblage contribuent au résultat. Mais pour avoir une idée inexprimable par des mots il faut déguster les différents produits sur place.

L'exemple du soin apporté à la distillation est significatif. J'ai pu m'en rendre compte un jour de novembre en pleine période de distillation. Le préposé à l'ouvrage utilisait des bûches de bois d'aulne, arbre qu'ils appellent "berne". Il doit être très sec et fendu en bûches toutes de dimensions identiques. Le châtaignier est également utilisé, les vieux piquets de vigne qui sont bien secs font aussi l'affaire une fois leur longueur réduite uniformément à un mètre. Ce qu'on recherche, c'est la flamme et non la braise d'un bois aux fibres tendres et lâches, de faible densité, presque sans cœur, à l'embrasement immédiat, aux flammes rouges et jaunes traversées par de petites gerbes d'étincelles, se consumant avec des murmures ardents joliment troublés par quelques pétillements. La régularité de la chauffe est essentielle, 24 heures sur 24 la surveillance est rigoureuse, un œil sur le feu, un œil sur la sortie du serpentin. La voilà, l'eau-de-vie, miracle de cette alchimie. Un liquide encore un peu tiède dont le débit qui sert de régulateur doit être constant. Trop fort, le jet est saccadé, c'est le coup de feu, l'eau de vie est âpre, rude. Trop faible, elle n'a pas de consistance et vieillirait mal. Le patron s'assure lui-même du résultat en venant goûter de temps en temps avec sérieux l'eau-de-vie naissante . Joseph de Pesquidoux dit en poète "Le feu est l'âme de la distillation".

On peut se douter de l'importance du choix et de la qualité des cépages. La folle blanche, ici dénommée "piquepoult", avait disparu avec le phylloxéra, l'ugni blanc, le colombard, le gros menseng, sont rois dans ces terres que le cep affectionne : pas trop riches sinon la feuille prendrait le dessus au détriment du fruit.
Présentation des cépages,
les héros.
Le colombard L'ugni blanc Le gros menseng

Les grands coups de chaleur du plein été d'une intensité à faire courber la tête de bien des plantes produisent le sucre de ces grappes qui en raffolent. Les œnologues sont lyriques quand ils parlent des cépages : "le colombard a des arômes du fruit de la passion, de la mangue, de l'ananas, l'ugni blanc apporte la note florale, la vivacité, l'équilibre indispensables et forme un couple parfait avec le colombard, quant au gros menseng il rappelle les agrumes mûrs et l'abricot."

La qualité du bois dont sont faits les fûts est primordiale : du chêne noir du pays exclusivement et encore doit-il avoir un grain serré caractéristique du cœur de l'arbre, un fil, une sonorité, une odeur de glèbe sauvage que le tonnelier juge en artisan-artiste qu'il est. Ce chêne noir, courant en Gascogne, est un chêne pédonculé de cent ans d'âge qui a poussé au milieu d'autres essences; le tronc droit, dépourvu de nœuds, de l'arbre puissant qui a cherché la lumière. Il est noir car son feuillage sombre a profité des pluies fines de printemps et du soleil caniculaire de l'été. La bille sera dépouillée de son aubier, puis fendue pour que soit conservé aux douelles finalement obtenues, le fil du bois. La scie est complètement exclue qui sectionnerait ce fil et permettrait la fuite du liquide par d'imperceptibles canaux. Les douelles sècheront quatre ans au moins, exposées aux intempéries qui les aguerriront. Enfin la douelle sera mise aux cotes convenables à l'aide d'une varlope et de gabarits. En effet les éléments juxtaposés qui formeront le tonneau obéissent à une géométrie stricte : le tonneau étant bombé, les douelles doivent être plus larges au milieu qu'à leurs extrémités et les bords doivent être taillés selon un angle avec les faces qui tient compte du diamètre du tonneau.

Enfin d'infinies précautions sont prises pour choisir le tonneau de destination de l'eau-de-vie en fonction de l'âge du tonneau. Le séjour dans un fût récent ne doit pas se prolonger, le produit deviendrait âcre. Et les chais ont leur personnalité : un chai sec perdra moins en degré d'alcool et davantage en évaporation par rapport à un chai humide où ce sera le contraire. Cette déperdition, la part des anges, varie de 2,5 à 4% par an.

Les deux grandes spécialités du Château du Tariquet sont le divin vin blanc des Côtes de Gascogne et l'armagnac.

L'armagnac trois étoiles a ici quatre ans de fût et le VSOP (en anglais Vert Superbe Olid Pale, que les Gascons traduisent Versez Sans Oublier Personne) sept ans. La demande existe de plus en plus pour les armagnacs millésimés. Le millésime est garanti et peut être contrôlé, il suffit de confier un échantillon à un laboratoire spécialisé qui, à l'aide de la méthode de datation par le carbone 14, détermine l'année de récolte sans erreur possible.

J'allais oublier la Folle blanche spécialité de la maison, qui est un alcool blanc à 46°, élaboré avec le cépage folle blanche au goût étonnant, rencontré nulle part ailleurs. À découvrir sans attendre et sans risque. J'ai un faible. Un délice !
Et le floc, à déguster sans hésiter.

Mais je ne peux pas tout dire ici; les mots ne suffisent pas. Il faut aller sur place pour faire vraiment connaissance.

J'allais aussi oublier la "Vendange tardive" qui n'existe nulle part ailleurs. Je ne sais la décrire avec des mots à la façon élégante des œunologues. Là encore, il faut goûter.

Voici l'élégante signature de la maison, en guise d'au-revoir :



Irrévérence :
"Les bons crus font les bonnes cuites ! "    Pierre Dac


Le simple geste d'ouvrir une bouteille de vin a procuré plus de bonheur à l'humanité que tous les gouvernements de l'histoire mondiale. Les religions elles-mêmes ne sont que de simples pièges spirituels, comparées au "plop" du bouchon, au délicieux grincement que celui-ci produit quand on le délivre de son étau, suivi du noble murmure du vin qui coule, un murmure semblable à celui de la source, la matrice de toutes les rivières de la terre.
Jim Harrison, Extrait de "La Revue des deux Mondes", janvier 2000.


Le rosé donne mal à la tête, c'est une couleur qui ne plaît pas.
1000 brèves de comptoir
de Jean-Marie Gouriau. Michel Lafon Ed.


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